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Marc Seguin grand industriel, créateur des ponts suspendus et de la chaudière tubulaire pour les locomotives à vapeur

10 Novembre 2020 , Rédigé par Jean-Marc CARON Publié dans #Vies intéressantes

Marc SEGUIN (1786-1875)

Marc SEGUIN (1786-1875)

Ce n’est pas un hasard si je m’intéresse de près à ce personnage, j’avais déjà écrit sur lui il y a plus de vingt ans, dans un opuscule qui a paru une dizaine d’années, émanant du « Cercle Généalogique de l’Assurance Maladie du Val d’Oise », dont j’étais parmi les créateurs et premier président, créé en 1997 et qui perdura une dizaine d’année.

C’est dans le numéro 3 de ce magazine intitulé « Le Temps qui passe ! » que j’avais concocté la première mouture de cet article. Il sera ici revu et corrigé grâce aux technologies actuelles, mais la matière est toujours la même !

Le Temps qui Passe ! N° 3

Ce n’était pas non plus un hasard si j’avais déjà écrit cet article à l’époque, car je m’intéresse également au modélisme ferroviaire, en plus de la généalogie, et c’était un bon moyen de lier mes deux passions, le chemin de fer est un milieu dans lequel on connaît bien Marc Seguin, qui inventa la chaudière tubulaire, une grande révolution dans le fonctionnement des locomotives à vapeur, et je m’y suis donc intéressé.

Origines de la famille

C’est à Annonay, dans l’Ardèche, que notre personnage a vu le jour, le 20 avril 1786 et il où il est revenu finir sa vie pour y mourir le 24 février 1875.

Vue panoramique d'Annonay Par Goudan07 — Travail personnel, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=20666362

De ses ancêtres, on sait peu de choses. Une théorie vise à les faire venir d’Alexandrie, en Égypte, et qu'ils auraient été de culte israélite. C’est l’un de ses membres, Antoine, qui serait venu se fixer dans le Dauphiné en 1598. Une des branches de ses descendants se fixent à Tain-l’Hermitage, une autre à Avignon et à Montpellier, et un troisième à Annonay. Toutefois, on sait que la famille Seguin est connue dans cette ville depuis le XVe siècle, c’est sans doute d’un rameau de cette famille qu’est issu notre ingénieur.

Le plus ancien ancêtre connu de Marc Seguin se prénommait Antoine. On ne connaît pas le nom de son épouse, mais il eut un fils, Louis, qui décéda à Tain-l’Hermitage en 1685, après y avoir épousé vers 1675 Marguerite Luyton, qui lui donna un fils unique, prénommé Antoine, né à Tain-l'Hermitage le 3 juillet 1678, et qui y décéda le 25 novembre 1723. Cet Antoine se maria deux fois dans cette même commune, il épousa en premières noces Thérèse Salanard, qui lui donna huit enfants entre 1699 et 1709, puis en secondes noces le 10 mai 1712 Jeanne Pons, née à Saint-Donat-sur-l'Herbasse, toujours dans la Drôme le 17 juillet 1677, et décéda à Tain le 1er mars 1764, à 86 ans. Ils eurent six autres enfants, dont le dernier, Marc Seguin, fut le grand-père de notre ingénieur.

 

I)            Antoine SEGUIN marié le  Épouse inconnue
  dont   
II) Louis SEGUIN († 1685) marié vers 1675 Marguerite LUYTON († 1698)
  dont  
III)        Antoine SEGUIN (1678-1723) Tain-l'Hermitage (26) marié (1) avant 1699 Thérèse SALANARD
  dont huit enfants  
III)        Antoine SEGUIN (1678-1723) Tain-l'Hermitage (26) marié (2) 10 05 1712 Jeanne PONS (1767-1764)
  6 enfants dont le dernier :  
IV) Aymard (Marc Aymard) SEGUIN né à Tain le 3 juin 1720, y † le 17 prairial An XII (06 06 1804) marié à Annonay (07) 17 02 1756

Marianne PEYRON née à  Annonay 15 05 1735, y † le 15 12 1760

Ce second Marc (dit l'Ancêtre) de la dynastie est né à Tain-l'Hermitage le 3 juin 1720, y fut baptisé le lendemain, et y décéda le 17 prairial An XII (06 06 1804).

Acte de baptême de Marc(Aymard) Seguin senior.

Il épousa à Annonay le 17 février 1756 Marianne Peyron, originaire de cette commune où elle était née le 15 mai 1735, et où elle décéda le 15 décembre 1760. Elle donna quatre enfants à son mari :

V-1) Marianne, née le 12 novembre 1756, et décédée le 11 nivôse An XI (01 01 1803), elle devint religieuse.

V-2) Marc François Seguin, né à Annonay le 6 octobre 1757, y décédé le 12 avril 1832. Il sera le père de Marc Seguin, l'ingénieur. Nous y reviendrons par la suite.

 

Marc François Seguin, père de l'ingénieur

V-3) Anne-Françoise Seguin, née le 12 mars 1759 à Annonay, et décédée à Tain-l'Hermitage le 4 octobre 1817. Elle épousera à Annonay le 21 novembre 1791 un négociant en vin et et soie, Balthasar Mac Ker, Suisse né à Délémont dans le canton du Jura, le 6 janvier 1758, et décédé à Tain le 7 mai 1825. Ils n'auront qu'une fille : 

V-3-1) Cécile Mac Ker, née à Tain le 16 nivôse An V (5 janvier 1797) qui épousera à Tain en 1813 son cousin germain Camille Seguin, frère de notre inventeur Marc Seguin

V-4) Stanislas Seguin, né à Annonay le 7 avril 1760, et décédé à Montpellier le 19 pluviôse An III (7 février 1795). Il fut docteur en Sorbonne.

 

 

Revenons maintenant à notre N° 2 ci-dessus, Marc-François Seguin.

V-2) Marc François Seguin se marie le 10 novembre 1782 à Vidalon-lès-Annonay (hameau maintenant intégré à la commune de Davézieux) avec l'héritière d'une autre famille industrieuse de la ville d'Annonay, Augustine-Thérèse de Montgolfier, de la famille des inventeurs des ballons à air chaud.

Marc François est à la tête d'une fabrique de draps quand il crée en 1796 la Société Seguin et Cie. Celle-ci sera le début de l'aventure industrielle de la famille. Le couple aura sept enfants, cinq garçons et deux filles :

VI-2-1) Marianne Augustine Seguin, née à Annonay le 16 août 1783, y décédée le 28 février 1786.

VI-2-2) Marc Seguin, dit Seguin Aîné, né à Annonay au 2, rue Trachin le 20 avril 1786, et décédé au même lieu le 24 février 1875. C'est lui qui fait l'objet principal de cet article, et sa vie sera détaillée plus loin. Il se marie deux fois, d'abord le 1er septembre 1813 à Annonay avec Rose Augustine Duret, née au même lieu le 24 août 1794, et y décédée le 2 juin 1836, après lui avoir donné 13 enfants. Sa mère était une fille de la famille de Mongolfier. Veuf, il se remaria à Marmagne, en Côte-d'Or, avec sa nièce par alliance, Marie-Augustine de Montgolfier, de 33 ans sa cadette. Elle lui donnera 6 nouveaux enfants.

VI-2 3) Augustin Stanislas né à Annonay le 9 août 1790

VI-2-4) Camille Seguin, né à Annonay le 25 décembre 1793, y décédé le 10 octobre 1852. Il épousa à Tain-l'Hermitage le 3 novembre 1813 sa cousine germaine Cécile Mac Ker (voir ci-dessus V-3-1), dont 6 enfants, dont :

VII-2-4-4) Thérèse Augustine Seguin, née à Annonay le 30 janvier 1822 et décédée à Paris VIII le 30 octobre 1884 (voir ci-dessous VI-2-6)

Camille Seguin

VI-2-5) Jules Seguin, né à Annonay le 1er avril 1796, décédé à Paris IX le 10 05 1868, marié à Lyon le 19 janvier 1830 à Louise Claudine Prudhomme, née à Lyon le 12 mai 1807.

VI-2-6) Paul Seguin né à Annonay le 27 février 1797 et décédé le 6 juillet 1875, épousa en premières noces à Amplepuis (Rhône) le 12 mai 1834, Joséphine Largnon, dont une fille, et en secondes noces à Annonay le 8 mars 1843 sa nièce Thérèse Augustine Seguin, fille de son frère Camille (voir VI-2-4 ci-dessus), dont une fille et un garçon.

VI-2-7) Charles Seguin, né à Annonay le 5 juillet 1798, décédé à Paris I le 15 juin 1856, marié à Paris II le 10 mars 1836 avec Marie-Anne Antoinette Jeanne Petroz.

VI-2-8) Thérèse Seguin, née le 12 août 1799 à Annonay, y décédée le 7 novembre 1823, mariée dans cette même ville le 13 octobre 1822 à Claude Marie Vincent MIGNOT.

Biographie de Marc Seguin

Jeunesse et formation (1786-1821)

Né en 1786, il grandit à Annonay en pleine période révolutionnaire. Sa famille maternelle, les Montgolfier, sont des industriels bien implantés dans la commune, propriétaires d'un papeterie fondée un siècle plus tôt par la famille, « Les Papeteries de Vidalon-lès-Annonay ». Elle a le titre de « Manufacture royale », qui assure son exploitant contre toute concurrence déloyale ou usurpation de marque, depuis le 19 mars 1784. Joseph et Étienne de Montgolfier, les deux oncles de Marc Seguin, ont été anoblis le même jour par Louis XVI, suite à l'envol du premier aérostat depuis la cour de l'usine le le 14 décembre 1782.

L'atelier de mécanique des Papeteries d'Annonay

Dans la commune, plus d'établissement scolaire n'existait durant la période révolutionnaire, et sa mère lui apprenait à lire et écrire. Puis il fut envoyé dans la zone montagneuse du département, à Talencieux, chez un pauvre prêtre, le prieur Gros, ancien prieur des dominicains réfugié dans ces montagnes. Pour subsister, il s'est improvisé professeur, et héberge quelques enfants à titre d'élèves. Classe en plein air, on dort dans une grange, et les repas, comme l'instruction, sont bien maigres. Le père Gros est surtout réfractaire aux mathématiques, ce qui fera dire à son élève, le jeune Marc à son départ « Je crois bien que vous ne m'avez pas appris grand'chose ; mais tout de même, je vous remercie, et quand je serai plus grand, moi, je vous apprendrai à "chiffrer". » Il conserva néanmoins une vénération touchante de son premier professeur, et en riait de bon cœur en se rappelant ces souvenirs.

Il fut alors envoyé à Paris dans un pensionnat qui vient d'ouvrir, afin de lui assurer une instruction plus complète. Il a 13 ans. Toutefois, ce petit provincial, vêtu chichement, avec des sentiments religieux très forts, son accent prononcé, dénote parmi ses condisciples, qui ne tardent pas à le persécuter. Toutefois, s'il n'égale pas leur élégance, il les dépasse par son savoir.

Son grand-oncle, Joseph de Mongolfier, démonstrateur (avec le mathématicien André-Marie Ampère) au Conservatoire national des Arts et Métiers, lui sert de guide dans son apprentissage et lui ouvre souvent les portes de son laboratoire où le jeune provincial découvre tout un monde de machines qui le passionne.

Joseph de Montgolfier
André-Marie Ampère

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Conservatoire National des Arts et Métiers

Il rentre au pays en 1805, pour occuper la place que son père lui a réservé dans la draperie familiale : la visite et le démarchage de la clientèle. Il doit donc chevaucher, par tous les temps, dans les montagnes du Velay et du Vivarais. Toutefois, il emporte toujours avec lui des livres scientifiques qu'il lit lors de ses étapes de repos dans sa chambre à l'auberge.

Les frères de Marc, au fur et à mesure que leurs études à Paris se terminent, reviennent au pays l'un après l'autre. Il faut donc leur trouver de l'occupation dans la fabrique familiale. Toutefois, les ventes diminuent et les frères Seguin essaient, vers 1820, de convaincre leur père de fabriquer une nouvelle usine destinée à la fabrication des feutres pour papeteries, sur les bords de la Canche eu lieu-dit Saint-Marc. Celle-ci sera réalisée en 1822. 

Entre temps, Marc a convolé à Annonay le 1er septembre 1912 avec sa cousine germaine, Rose Augustine Duret.

 

L'époque des inventions (1822-1837)

Marc Seguin (Seguin Âiné tel qu'il sera désigné dorénavant) sera chargé de l'achat et de l'installation du matériel de la nouvelle manufacture. La fratrie Seguin s'ingénie pour parvenir à faire augmenter la production. Cela passe par la connaissance de tous les outils nécessaires à la fabrication de draps : outils mécaniques, hydrauliques, à vapeur, chimiques, etc.

Marc Seguin commence par remplacer les roues à aube de la vieille fabrique familiale par des roues à augets. En effet, ceux-ci retiennent dans leur partie creuse une partie de l'eau qu'ils recueillent, au lieu que celle-ci ne s'échappe vers l'axe, comme cela se produit avec les roues à aube.

Roue à aubes
Roue à augets

 

 

 

 

 

 

 

Au fur et à mesure des inventions des frères Seguin, l'entreprise finit par prospérer. Toutefois, un problème majeur demeure : les difficultés de transport freinent les échanges commerciaux. À l'époque, les ponts sont coûteux à bâtir, et leur construction en pierre peu adaptée au franchissement de fleuves capricieux tels que le Rhône, et ce sont des bacs à traille qui permettent de les franchir.

Un bac à traille

C'est en 1821 qu'un ingénieur des Ponts et Chaussées, en mission dans la région, rencontre Marc Seguin et lui soumet le problème du remplacement des ponts de pierre par un système aussi fiable et moins coûteux. Seguin promet d'étudier la question. Il se procure le livre "Treatise on Bridge Architecture (New-York, 1811)", de Thomas Poppe. Le système des ponts suspendus qui s'y trouve développé lui paraît prometteur. Les Américains suspendaient leurs ponts à des barres de fer, dont Marc Seguin pensait qu'il était certainement possible de trouver un système moins lourd et surtout moins coûteux. Après maints calculs, il en conclue que des faisceaux de fil de fer donneraient une pleine sécurité, et allégeraient grandement la structure du pont. Pour tester le procédé, il fait installer, dans l'usine familiale de Saint-Marc, une passerelle de 18 m de long sur 50 cm de larges, sur la Canche. Les différentes épreuves qui y sont lancées ainsi que son faible coût conduisent Marc Seguin à valider le procédé.

Passerelle Seguin sur la Canche

Une seconde expérience est tentée l'année suivante : une passerelle de 30 m de long et 1,65 m de large de type "pont en fil de fer", 2e prototype construit en 1823 par les frères de Marc SEGUIN après la passerelle sur la Canche en 1822. Cet ouvrage a permis de vérifier les calculs effectués par ce dernier et donc d'obtenir l'autorisation pour la construction du premier pont suspendu à Tournon, ouvert en 1825 et détruit en 1965. La passerelle, jetée sur la rivière la Galaure, est destinée au passage des piétons, des cavaliers et des bêtes de somme. Le test de l'ouvrage a lieu dans des conditions plutôt périlleuses, mais rassurantes pour l'avenir.

Encouragé par ces résultats, Marc Seguin demande en 1822 à la préfecture l'autorisation de lancer un pont suspendu sur le Rhône entre Tain-l'Hermitage et Tournon. Après d'âpres discussions avec un ingénieur des Ponts et Chaussées qui préfère le système à chaînes, il obtient de l'Académie des Sciences un avis favorable à ce projet, le 25 janvier 1824.

Les frères Seguin (Marc, Camille, Jules, Paul et Charles) obtiennent par ordonnance royale, de construire le pont à leurs frais  « moyennant la concession qui leur est faite d’un droit de péage à établir sur cette passerelle », pour 99 ans. C'est la première concession d'utilité publique concédée à une entreprise privée. Cette passerelle, qui fut construite en 1825, et inaugurée le 25 août de la même année, après avoir subi une série de tests dont l'un d'eux consista, à la demande de Marc Seguin, voyant que la foule, nombreuse, semblait incrédule, à la faire marcher au pas cadencé sur le pont. Il dut être convaincant, car les badauds se pressèrent d'exécuter cette promenade, somme toute originale ! Le pont  tient bon ! Mais il se révéla toutefois trop bas pour le passage des bateaux à vapeur. Les frères Seguin sont donc contraints par une ordonnance royale du 7 février 1847 soit de rehausser le pont, soit d'en construire un autre, ce qui fut fait entre 1847 et 1849,  par la passerelle actuelle qui sera classée Monument Historique en 1985. L'ancien pont fut transformé en passerelle, et détruit en 1965.

Le premier pont de Tournon, construit en 1825 et détruit en 1965
Pont de Tain-l'Hermitage à Tournon, construite par Marc Seguin entre 1847 et 1849. Monument historique en 1985
Vue des deux ponts de Tournon (1825 et 1849) simultanément en service

C'est donc le début de la gloire (et de la fortune !) pour les frères Seguin. Des ponts suspendus sont construits partout, les frères Seguin en érigeant quatre-vingt dix. Il y en avait plis de 200 en 1841 et plus de 500 sont aujourd'hui en service sur le modèle Seguin. Le plus vieux encore en service est à Andance, à quelques km d'Annonay, construit en 1827, la passerelle Saint-Symphorien à Tours de 1847, ainsi que le pont de Tournon, sont les trois ouvrages des entreprises Seguin Frères encore en service aujourd'hui.

Pont Seguin à Andance
Passerelle Saint-Symphorien à Tours

 

La chaudière tubulaire

C'est lors d'un voyage à Genève pour seconder deux ingénieurs suisses désireux de construire l'un de ses ponts, que Marc Seguin voit évoluer un bateau à vapeur construit par un américain. Il se dit alors que le système pourrait être adapté pour remonter le Rhône.

Pierre François de Montgolfier, cousin germain de sa mère, avait déposé un brevet en 1917, sur le principe de halage sur points fixes. Marc Seguin s'y associe, ainsi qu'un autre originaire d'Annonay, Louis Henri Daniel d'Aymé pour fonder en 1825 la « Société de halage sur le Rhône par la vapeur, à points fixes ». Plusieurs bateaux, le "Ville d'Annonay" et le "Voltigeur" sortent des chantiers d'Andance en 1824. Les machines à vapeur des points fixes sont acquises à Londres, fin 1825, construites sur des plans de Marc Seguin lui-même. Toutefois, elles se révèlent insuffisantes. La société fonctionne donc bon an mal an jusqu'à ce qu'un accident intervienne sur un bateau à vapeur, le "Rhône", qui, ayant percuté une pile du pont de la Guillotière à Lyon et que sa chaudière qui avait été imprudemment surchargée, n'éclate. Le bateau coule provoquant la mort de 28 personnes. La navigation à vapeur su le fleuve est donc suspendue. La société sera liquidée en novembre 1828. Ce sera l'un des rares échecs commerciaux de Marc Seguin.

Bateau à vapeur "Le France" sur le Rhône à proximité de Tain-l'Hermitage
Remorqueur à vapeur sur le Rhône

Toutefois, cette expérience le conduira à se pencher sur le fonctionnement des chaudières à vapeur, celles d'origine anglaise de ses bateaux ayant donné un faible rendement. Il se penche alors sur un autre type de production de la vapeur, la chaudière tubulaire.

Il va en installer trois, pour essais, sur un bateau à vapeur qui fera la navette plusieurs fois entre Vienne et Lyon. Il se heurte alors à l'hostilité des mariniers du Rhône. Néanmoins, suite à ces essais tout à fait concluants, il demandera le 12 décembre 1927 un brevet qu'il obtiendra le 22 février 1828. Toutefois, il ne l'utilise pas et le laisse libre d'utilisation.

Une chaudière tubulaire
Locomobile Merlin à chaudière tubulaire

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

L'avènement du chemin de fer en Angleterre

C'est en 1825 que débute en Angleterre une autre révolution technique qui va changer le monde. Le chemin de fer de Stockton à Darlington est en effet mis en service cette année là, première ligne au monde à utiliser des machines à vapeur et à transporter des voyageurs.

Dès le début (1825) Marc Seguin s'intéresse à ce nouveau moyen de transport et traverse la Manche avec son cousin Pierre François Montgolfier pour aller étudier de près cette technique. Ils y rencontrent Georges Stephenson, qui a participé et investi dans la construction de la ligne.

De retour en France, Marc Seguin convainc le ministre des Finances de l'époque, Joseph, comte de Villèle, suite à une étude très détaillée, de faire construire la ligne de Saint-Étienne à Lyon, longue de 56 km.

George Stephenson
Joseph de Villèle, ministre des Finances

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Pendant ce temps, outre-Manche, la construction de la première ligne est terminée. 

Celle-ci est prévue pour une traction hippomobile, mais Stephenson envisage d'y faire fonctionner des machines à vapeur. La ligne est inaugurée le 27 septembre 1825, reliant Stockton à Darlington, afin de transporter la houille extraite des mines de Shildon jusqu'au port de Stockton, pour l'embarquer sur des bateaux du fleuve Tees. Le trajet est très long, quatre heures à l'aller (à plein), et cinq au retour à cause d'une pente à remonter.

Puis, en 1826, la seconde ligne est ouverte, entre Liverpool et Manchester, afin de concurrencer les trois canaux arrivant à Manchester. La compagnie organise alors un concours ouvert à tous les constructeurs anglais, afin de fabriquer des machines aptes au transport sur voie ferrée. Les conditions sont les suivantes :  La machine, montée sur six roues, ne peut peser plus de six tonnes. Elle doit traîner, sur un plan horizontal, avec une vitesse de 16 kilomètres à l'heure, un poids de vingt tonnes, en comprenant dans ce poids l'approvisionnement d'eau et de combustible. — Si la machine ne pèse que cinq tonnes, le poids à remorquer est réduit à quinze tonnes. — Le poids des locomotives portant sur quatre roues peut être réduit à quatre tonnes et demie. — Enfin, le prix de la machine agréée ne peut excéder 550 livres sterling. Un prix de 500 livres sterling sera attribué au vainqueur, ainsi que l'assurance de fournir le matériel de la ligne.

Le 6 octobre 1829, le concours a lieu. Cinq machines sont amenées à concourir. La première à s'élancer est la « Rocket » de George Stephenson et son fils Robert. Elle remorque 13 tonnes à 30 kilomètres à l'heure, sur un plan horizontal. Elle remporte le concours haut la main, après avoir rempli toutes les conditions exigées. Elle devait sa victoire à sa chaudière : une chaudière tubulaire de Marc Seguin !

La Rocket, de Stephenson

En France, le chemin de fer dans les mines est encore inconnu, tandis qu'il était largement utilisé en Grande-Bretagne pour transporter la houille. C'est seulement en 1823 qu'un ingénieur des Mines, Louis Antoine Beaunier, obtiendra l'autorisation d'ouvrir une ligne de Saint-Étienne à Andrézieux pour transporter le charbon jusqu'à la Loire. Cette ligne sera à traction hippomobile.

L'entreprise Seguin Frères, associée à l'académicien Édouard Biot, obtient la concession de la ligne de Saint-Étienne à Lyon, par ordonnance du toi Charles X le 7 juin 1826, et la « Compagnie du Chemin de Fer de Saint-Étienne à Lyon » est créée le 7 mars 1827.

Demande de concession de la ligne. Par Neantvide — Travail personnel, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=70554984
Demande de prolongarion de Givors à Lyon. Par Neantvide — Travail personnel, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=70554984

 

La Compagnie du Chemin de Fer de Saint-Étienne à Lyon

L'entreprise ayant obtenu la concession, Marc Seguin commence à dessiner les plans et le tracé, approuvé par ordonnance royale du 4 juillet 1827.

Plan de la ligne Si-Étienne-Lyon Par Michel Cotte, Professeur à l’université Technologie de Belfort-Montbéliard. — Michel Cotte, « Définition de la voie ferrée moderne : la synthèse du Saint-Étienne - Lyon (1825-1835) », Revue d’histoire des chemins de fer [En ligne], 27/2003, mis en ligne le 15 janvier 2015, consulté le 21 août 2016. URL : http://rhcf.revues.org/1913 ; DOI : 10.4000/rhcf.1913., CC BY 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=50789512

Mais les difficultés vont maintenant commencer, car il n'existait pas à l'époque de loi d'expropriation, et les conflits avec les propriétaires des terrains traversés se sont souvent terminés en pugilat.

Mais enfin, après bien des péripéties, la compagnie a fini par acheter 900 parcelles de terrain, à des conditions souvent très onéreuses. La construction se poursuit, jusqu'à Givors, où il est envisagé de traverser la rivière pour continuer sur la rive gauche. Une telle levée de boucliers de la part des habitants de la ville ont contraint la compagnie à y renoncer. On continue donc sur la rive droite. Une vaste gare d'eau à Givors assure la transition entre le train et le bateau.

La compagnie utilise, pour la construction de la voie ferrée, des rails en fer posés sur des traverses en bois, au lieu de la fonte posée sur des cubes de pierre utilisée dans les mines. Le premier tronçon est ouvert à la circulation, entre Givors et Rive-de-Gier, le 28 juin 1830. Pour le moment, il est en traction animale. Mais en 1831, la locomotive Seguin, qui a commencé à rouler le 1er octobre 1829 quelques jours avant celle de Stephenson, remorque sur la ligne, de Givors à Rive-de-Gier, de 24 à 28 wagons vides, ou 7 wagons chargés de 21 tonnes chacun, en 1 h et demie.

Locomotive Seguin
autre vue de la locomotive

 

 

 

 

 

 

 

 

Pendant ce temps, on continue de construire les prolongements, et, en premier, les ouvrages d'art : ponts et tunnels. Le tunnel de Couzon, long de 977m, est ainsi creusé à Rive-de-Gier, et le pont de la Mulatière (400m) est érigé à Lyon.

Percement du tunnel de Couzon
Pont de La Mulatière

 

 

 

 

 

 

 

 

Le tunnel de Terrenoire (1506m), construit à l'origine à une seule voie entre 1830 et 1832, et qui sera remis à double voie par la suite.

Tunnel de Terrenoire à Saint-Étienne
Entrée actuelle du tunnel de Terrenoire

 

 

 

 

 

 

 

 

La seconde section, de Rive-de-Gier à Lyon, est mise en service pour les voyageurs le 1er octobre 1832, et ouverte aux marchandises (charbon principalement) le 25 février 1833.

La mise en service totale de le ligne eut lieu le 4 avril 1833.

Il n'y eut pas d'inauguration officielle, car à l'époque de la Révolution de 1830, le peuple grondait. Le duc d'Angoulême, fils de Charles X, était venu voir cette nouvelle curiosité, quand Marc Seguin, pour l'accueillir, se mit à crier « Vive le duc d'Angoulême ! » Le peuple étant hostile se mit à ricaner et un rire moqueur répondit à l'acclamation de l'ingénieur. Celui-ci en fut quitte pour réconforter le prince, que cet accueil avait douloureusement impressionné. En fait de triomphe, cette journée fut pour Marc Seguin, l'une des plus pénibles de sa vie.

De plus, d'autres inconvénients attendent ce nouveau moyen de transport : tous les métiers qui vivaient du convoyage des marchandises et de la poste aux chevaux (pour les maîtres de poste, voir ici : Une dynastie de maîtres de Poste ) mènent un front uni contre lui, on fait dérailler les trains, sauter les chaudières, les wagons sont brûlés, d'autant plus facilement qu'on les garnissait de pailles pour un plus grand confort des voyageurs, etc. Pour offrir un certain luxe aux voyageurs, la Compagnie avait garni les banquettes de drap, et installé des fenêtres avec des tirants de cuir : les voyageurs se taillaient des gilets dans les draps et des bretelles dans les tirants de cuir !

Des trains de la ligne Lyon-Saint-Étienne
De l'influence des chemins de fer...

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Cette ligne de Saint-Étienne à Lyon est la première en France à expérimenter le transport des voyageurs et des marchandises par des locomotives à vapeur. C'est seulement cinq ans après le 24 août 1837, que la seconde ligne entre Paris-Saint-Lazare et Saint-Germain-en-Laye est inaugurée, seulement ouverte aux voyageurs. Marc Seguin a publié en 1939 son expérience sur les travaux de Chemin de Fer :  « De l'influence des Chemins de fer et de l'art de les tracer et de les construire ».

La ligne de Paris à Versailles-rive-gauche

Non encore rassasié des chemins de fer, Marc Seguin se lance en 1837 dans un nouveau défi : construire une ligne de chemin de fer entre Paris et Versailles.

D'entrée, cette liaison est concurrencée par une ligne en doublon, qui serpente sur la rive droite de la Seine, entrée en service un an plus tôt. Le ministère des Travaux Publics avait fait étudier par les ingénieurs de l'État un tracé par la rive droite en raccord avec la ligne de Saint-Germain, mais la commission parlementaire voyait plutôt une ligne sur la rive gauche. Après bien des discussions, le ministre du Commerce et des Travaux publics, Hippolyte Passy accepte la construction des deux lignes, et la loi est promulguée par le roi Lois-Philippe le 9 juillet 1836.

Hippolyte Passy, ministre des travaux publics
Louis-Philippe Ier, roi des Français

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Mais après la déconvenue qui a fait suite à la société des transports sur le Rhône (voir plus haut), il va essuyer des ennuis encore plus durs. Cette affaire lui coûte une partie de sa fortune, compte tenu des difficultés rencontrées en 1842 pour la construction du viaduc de Meudon et de la tranchée de Clamart. Il obtiendra, après procès, un dédommagement de 800 000 frs de la part de la compagnie, pour travaux imprévus.

Viaduc de Meudon, lors de sa construction
Tranchée de Clamart

 

Changement de vie

En 1838, survient un tournant dans sa vie. Il avait perdu deux ans auparavant son épouse, Louise Augustine Duret âgée de 41 ans, décédée le 2 juin 1836 des suites de son dernier accouchement, la naissance de sa fille Mathilde, née le 30 mai, treizième enfant du couple.

Marc Seguin convole donc en secondes noces, à Marmagne (Côte-d'Or) le 18 mars 1838, avec Marie-Augustine de Montgolfier, sa nièce par alliance. Elle a 19 ans, il en a 52. Mais son nouveau beau-père, Louis Simon Élie Ascension de Montgolfier, le père de son épouse, était également son ancien beau-frère, car il avait épousé Pauline Claudine Duret, sœur de Louise Augustine, première épouse de Marc Seguin ! Drôle d'imbroglio familial ! 

Son beau-père était alors propriétaire de l'ancienne abbaye de Fontenay, fondée en 1118 par Bernard de Clairvaux, à Marmagne, transformée en papeterie depuis la Révolution.

Ancienne abbaye de Fontenay vers 1920. Par Ab8442 — Travail personnel, CC BY 3.0, httpscommons.wikimedia.orgwindex.phpcurid=59896373

Marc Seguin rachète le tout, et restaure les usines et les bâtiments d'exploitation agricole. C'est aussi un changement de cap familial : victime des rivalités tenaces dans le monde industriel qu'il fréquentait auparavant, il décide de changer de vie, et s'installe à Fontenay avec toute sa famille.

Une famille qui s'agrandit encore, sa nouvelle épouse lui donnera six nouveaux enfants, il aura 75 ans lors de la naissance le 21 mai 1861, de sa dernière fille, Louise Marie Madeleine. Il a créé une sorte de phalanstère où vit toute la famille, filles, gendres, beaux-frères, belles-sœurs, enfants et petits-enfants, si nombreux qu'il n'y a jamais moins de 35 personnes autour de la table du déjeuner !

Il semble que ce second mariage lui ai donné une seconde jeunesse, car notre patriarche se passionne de nouveau pour les sciences physiques et mathématiques, il sera même élu le 26 juin 1845, au premier tour de scrutin, correspondant de l'Académie des Sciences.

Toutefois, l'homme vieillit, et supporte de plus en plus mal l'humidité de la Bourgogne, où il vivait depuis vingt ans et décide de rentrer au pays natal. Il achète donc en 1858 à son ancien beau-père Mathieu Louis Pierre Duret (qui est aussi le grand-père maternel de sa seconde épouse !) une vieille demeure de famille appelée Varagnes d'en Haut.

Varagnes vue en ballon 2015 Par VLEFEVRESEGUIN — Travail personnel, CC BY-SA 4.0, httpscommons.wikimedia.orgwindex.phpcurid=42080712

Il a maintenant 73 ans, mais son cerveau est toujours en ébullition ! Il continue à s'enthousiasmer pour le réaménagement et la transformation de son domaine. Il a toujours autant d'appétit pour les sciences, et s'intéresse maintenant au domaine aérien. Il construisit même un ornithoptère, engin volant dont le vol est assuré par des battements d'aile, sur le principe du vol des oiseaux (le premier fut dessiné par Léonard de Vinci), mais l'engin ne fit que quelques sauts de puce.

Ornithoptère moderne Par Rilba — Travail personnel, CC BY-SA 3.0, httpscommons.wikimedia.orgwindex.phpcurid=21179023
L'ornithoptère de Léonard de Vinci

Il continue aussi à soutenir sa famille, et à se préoccuper du bien-être des Annonéens, pour lesquels il fit des dons aux œuvres sociales, et pour l'amélioration de l'orphelinat. Il rachète en 1861 la vieille papeterie familiale de sa belle famille Montgolfier, devenue Canson, pour lui éviter la faillite, et la confie à l'un de ses gendres.

Dans son domaine de Varagnes, il aménage des installations qui vont lui permettre d'en faire un lieu de réflexion et de création. Il fait ainsi construire une serre à double paroi, des ateliers de mécanique, de chimie, de peinture, une forge, une menuiserie, un lavoir, un séchoir révolutionnaire, une chapelle, mais aussi un observatoire.

Le parc lui-même est délicieusement aménagé : dans un livre sur Marc Seguin, il est décrit ainsi :  « Le Parc, fort bien dessiné, cache [Varagnes] aux regards indiscrets et donne la quiétude nécessaire au chercheur. De la cour, fermée sur trois côtés, on voit les Alpes par temps clair. Des escaliers facilitent le cheminement des maîtres, mais aussi des jardiniers qui préparent les fleurs dans les serres. Les visiteurs découvrent avec étonnement le fameux bain de mer : on se baigne dans l'eau salée à laquelle des palettes tournantes donnent un mouvement de vagues. Les orangers alignés sur la terrasse gagnent l'immense jardin d'hiver. Quant à la chapelle, Marc Seguin a prévu grand, trois cents personnes peuvent assister à la messe célébrée par un aumônier. Lors des frimas, les invités ne sont pas obligés de sortir. Seguin a pensé à tout : par l'intermédiaire des tribunes, la chapelle communique avec le jardin d'hiver ».

Observatoire de Varagnes Par Valérie Lefèvre-Seguin — Travail personnel, CC BY-SA 3.0, httpscommons.wikimedia.orgwindex.phpcurid=18391694
Atelier de chimie à Varagnes Par Valérie Lefèvre-Seguin — Travail personnel, CC BY-SA 3.0, httpscommons.wikimedia.orgwindex.phpcurid=18391687

En 1875, il entre dans sa 89e année. Ce grand vieillard à l'abondante chevelure blanche effectue toujours, par tous les temps, de longues promenades autour de sa propriété. Un matin, pourtant, il doit écourter sa promenade, son souffle devient court, et il doit s'aliter. Il comprend alors que son heure est venue et il s'éteint paisiblement, d'une fluxion de poitrine, le 24 février 1875.

La municipalité de Tournon fit ériger sa statue sur un terre-plein qui fait face au premier pont construit dans la ville en 1825, pour qu'il puisse le contempler pour l'éternité. Toutefois, lors de la destruction du pont en 1965, on fit bander les yeux de la statue afin qu'il ne puisse voir la destruction de son oeuvre.

Statue de Marc Seguin à Tournon

Enfin, un dernier honneur posthume lui fut rendu par l'un de ses pairs aussi célèbre que lui, Gustave Eiffel, qui l'a choisi ainsi que 71 autres savants, industriels et scientifiques qui ont honoré la France entre 1789 et 1889. Ces 72 noms sont inscrits sur la périphérie du premier étage de la Tour, en lettres d'or en relief de 60 cm de haut. Marc Seguin figure sur le côté qui fait face au Trocadéro, il est le premier à gauche.

Inscription sur la Tour Eiffel face Trocadéro
Détail de l'inscription de Marc Seguin

Pour plus d'informations, vous trouverez des compléments dans les liens suivants :

Marc Seguin dans lequel se trouvent d'autres liens imbriqués qui ont aussi servi ici

Sur la maison natale de Marc Seguin (voir paragraphe "La Commère""

Vie et œuvres de Marc Seguin

Sur la papeterie d'Annonay

Sur certains ouvrages de Marc Seguin

 

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